Phil Vai : 10 albums d’influence majeure sur ma vie
Publié le 21 Mar 2023 par Antonio Geraldo
La saga des top 10 albums qui ont changé la vie d’un.e punk rockcoeur, se poursuit cette fois avec mon ami Phil Vai. Un homme avec un grand cœur, maître des archives, mais surtout qui supporte la scène de façon exceptionnelle avec sa couleur personnellle.
-Antonio Geraldo
Salut le Bad Crew! Je suis Phil, la voix derrière Le Clash Podcast et le drum derrière La Dérape. Voici mon top 10, sans ordre précis; c’est trop déchirant en mettre un devant l’autre. Je me suis rendu compte que beaucoup d’albums sont pour moi évidents, voire clichés, mais c’est ainsi. Ce sont tous des albums qui m’ont grandement influencé et que j’écoute encore régulièrement. Je déroge un peu du punk, mais t’sais… qu’est-ce qui est punk et pas punk?
SUBLIME – 40oz. to Freedom
Je me souviens parfaitement du moment où j’ai pesé sur play dans le métro, quelques minutes après l’avoir acheté au HMV Centre-Ville. Waiting for My Ruca a immédiatement capté mon attention, car j’ai dû monter le volume de quelques coches pour entendre son minimalisme à travers le bruit du wagon. Je trouvais ça bizarre pour un album punk de débuter de façon aussi relax, j’avais peur d’avoir gaspillé 20$.
Ma crainte fut brève quand 40oz et Smoke Two Joints s’enchaînèrent, deux titres qui visaient clairement mon démographique cégépien. Je connaissais déjà un peu l’album éponyme grâce à mon frère et aux samedis soirs à CHOM en direct du Loft, mais c’est vraiment avec 40oz que Sublime m’a accroché. J’aimais le côté sale, cheap, l’enchaînement éclectique des styles et surtout la voix de Bradley. Avec les nombreux échantillonnages et clins d’œil à leurs influences, je découvrais toujours quelque chose de nouveau; c’était mon initiation à KRS-One, The Specials, Minutemen, Public Enemy, The Toyes, Bad Religion, Toots et j’en passe. J’ai souvent passé proche de me faire tatouer l’image de la pochette, mais à la place, je suis allé boire une 40oz à côté de la tombe de Bradley. Jusqu’à ce jour, je ne sais pas lequel est le mieux.
GREEN DAY – Dookie
À l’époque où je possédais uniquement les cassettes du Black Album, de Kill ‘Em All et du soundtrack de Top Gun, un ami dans l’autobus m’a fait une copie de Dookie… ma tête a explosé ! Ne connaissant à peu près rien du punk rock, ce fut ma première incursion dans le style duquel je n’ai pas encore décroché. En secondaire 2 et 3, mon walkman roulait presqu’exclusivement cet album. Le trajet aller-retour pour l’école prenait environ deux heures; j’écoutais donc l’album 3 fois et demi par jour, 5 jours semaine, à moins qu’un fatigant ne l’interrompe pour commenter le dernier épisode de La Petite Vie.
La performance à Woodstock 94 et le clip de Basket Case n’ont fait qu’alimenter mon intérêt pour le band (d’ailleurs, j’aspire encore à jouer du drum lorsque je serai en chaise roulante). Les spasmes de Billie Joe, l’attitude Paul Simononesque de Mike et la folie de Tre ont marqué mon imaginaire. Je voulais jouer comme eux, car c’était bien moins chiant que d’apprendre Damage Inc. Malgré les milliers d’écoutes de Dookie, je peux encore me le taper 2-3 fois de suite avec autant de plaisir. Quand The Longshot est passé aux Foufs il y a quelques années, Billie et moi avons eu un VRAI eye contact en chantant à l’unisson Ziggy Stardust. C’était un gros moment de bonheur.
RAMONES – Greatest Hits Live
Très loin d’être la sortie la plus mémorable du groupe, c’est néanmoins la première que j’ai entendue. Je connaissais Blitzkrieg Bop, j’aimais le clip I Wanna Be Sedated, sinon je ne connaissais pas grand chose des Ramones. Dans ma tête de jeune naïf, seuls Green Day et Metallica comptaient. Le déclic s’est fait lors de ma première inscription à la Maison Columbia. Étant à court d’idées après une sélection random de CD’s de The Fugees, Alanis Morrisette, Warren G, Method Man et Bush (X?), j’ai choisi le Greatest Hits Live.
Même si j’aime bien un Ready or Not ou Machinehead de temps en temps, seuls les Ramones sont restés dans mon panthéon (désolé Gavin). Les enchaînements frénétiques ponctués des 1-2-3-4 de CJ, la simplicité, leur style, l’énergie et les mélodies accrocheuses m’ont instantanément captivé. Le côté « comptine doo wop chantée par un crooner weird sur de la disto » est juste parfait. Je peux mettre leur discographie complète sans skipper aucune chanson.
Je me souviens d’une mésentente avec mon père, qui me disait à quel point la voix de Joey était mauvaise, que je devrais écouter du Led Zep à la place, n’importe quoi! Bref, depuis que j’ai entendu cet album, je suis obsédé par les Ramones. Ultimement, c’est aussi grâce à eux si j’ai commencé à m’intéresser à Patti Smith, Television et au R&B et Soul des années 60. Probablement mon groupe préféré (pour eux, je n’ai pas hésité pour le tatouage). Merci, Maison Columbia.
DAVID BOWIE – The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars
Je connaissais Labyrinth par cœur, mais je détestais la musique de Bowie. Je connaissais juste Let’s Dance. Des années plus tard, mon ami Gab m’a fait un mixtape avec ses pièces préférées, question de changer mon opinion. Succès. Après The Supermen, Andy Wharhol et Black Country Rock, j’ai sérieusement réévalué mon appréciation pour Bowie.
Comme des millions de personnes, le gros déclic a été avec la pièce Ziggy Stardust. La puissance du refrain, la guitare de Ronson, la voix et la plume de Bowie, l’histoire de l’extraterrestre qui veut sauver l’humanité avec sa musique, son look, etc.
Déjà dans le punk rock jusqu’au cou, je découvrais l’impact du glam et du proto-punk qu’a eu Bowie sur le genre. Un peu comme pour les Ramones, j’ai commencé une quête d’en apprendre plus à son sujet en passant par des biographies et des voyages dans des lieux qui s’y rattachent. Le style de Bowie évolue tellement au cours de sa carrière qu’il a y toujours un album venant agrémenter le mood du moment. De plus, l’univers de Bowie est une source inépuisable d’œuvres dans toutes les sphères artistiques (cinéma, arts visuels, danse… et mime). Je me considère chanceux d’avoir vu son dernier spectacle à Montréal. J’ai même trouvé Let’s Dance excellente.
SUBB – Until the Party Ends
J’ai entendu Highest Step to Hell à peine un mois avant la sortie de Until the Party Ends. C’était le meilleur 2 pour 1 pour commencer à triper sur un band. J’ai immédiatement embarqué dans le mélange de ska effréné et de punk intense de Subb. Autant Highest Step to Hell est entraînant et surchargé, c’est pourtant la qualité mélodique et les structures plus réfléchies de Until the Party Ends qui m’ont conquis. Bright Red Dress est une mes chansons préférées au monde; le début lent et lourd, le démarrage sans avertissement, le bout de drum de 54 secondes, « I’d let you wear my best tshirt, ‘cause you’re my favorite grocery clerk » sur un fond de basse et batterie… le poil me dresse à chaque écoute.
Le Jam des neiges, les clips à Musique Plus, les shows à guichets fermés au Spectrum; à mes yeux Subb n’avait rien à envier aux bands internationaux. C’est aussi avec Until the Party Ends que je me suis intéressé plus sérieusement à la scène locale. Subb est aussi associé à des beaux souvenirs avec mes amis, que ce soit en spectacle ou en CD dans une cuisine de Laval; ce fut la trame sonore d’une des plus belles périodes de ma vie. Je me considère privilégié d’avoir pu m’entretenir avec Jeff, Martin et Nick (mon drum hero juste après Lars), c’était haut dans ma « bucketlist de podcasteux« . D’ailleurs, j’ai encore plein de questions nichées, il faut remettre ça. Subb n’est plus, mais plusieurs membres sont encore actifs dans divers projets dont l’excellent Bring the Light et Le Dernier Assaut!
VULGAIRES MACHINS – 24:40
Mon petit frère, le même qui m’a fait découvrir Sublime et Anonymus, m’appelle dans sa chambre et me dit : « Écoute ça! : Parfois, elle vomit; Sur le tapis du salon; Et y a toutes sortes de p’tits mottons; On dirait des Smarties pu bons. » J’étais crampé, il n’en fallait pas plus pour rester accroché aux Vulgaires. Même si « Pistache » n’est pas le meilleur exemple, c’est sans surprise que la qualité et les propos des textes comptent énormément pour mon amour du groupe.
C’est clairement le band dont je connais le plus les paroles, c’est une bonne chose. Ils étaient le chaînon manquant pour faire le lien entre le familier punk californien et le punk franco pour lesquels j’avais peu de référents. Les harmonies vocales féminin/masculin donnaient aussi la touche qui les différenciait de tout ce que j’écoutais. 24:40 fut un point tournant pour mon intérêt envers la scène locale. C’était juste le début d’un amour pour un band qui n’a cessé de m’impressionner. Un très grand honneur d’avoir pu leur parler au balado. C’est tout simplement un des meilleurs bands de l’histoire du Québec.
METALLICA – KILL EM ALL
Quand j’étais en 4-5e année, j’avais un cousin plus vieux qui écoutait toujours du Metallica. Il habitait dans une maison isolée dans les bois, puis quand il mettait « Jump In the Fire » dans sa chambre mal éclairée, j’étais terrifié! En plus de Kill Em All, il avait le genre de EP/single avec la pochette du démon dans le feu qui rajoutait à ma peur; j’étais persuadé que la nuit venue, le diable allait mettre le feu à la place. Le nom du band, le titre de l’album, le sang sur la pochette et la frénésie dans leur musique m’ont complètement absorbé. J’ai compris par après qu’on était en plein raz-de-marée du Black Album. Metallica était partout, donc pour le nouveau fan que j’étais, mes besoins étaient alimentés.
Mes parents étaient choqués par leurs t-shirts, surtout le Metal up You Ass, je me sentais rebelle. Ce n’est pas une phrase populaire, mais Lars Ulrich était mon héros; c’est à cause de lui si j’ai commencé à jouer du drum. On ne peut pas négliger que mon 1er groupe s’appelait Stampede, en honneur de Four Horsemen. Tellement fan de Metallica, que quelques années plus tard, je me suis même fait prendre pour vol à l’étalage en tentant de prendre Master of Puppets et Ride the Lightning… sûrement le démon de Jump in the Fire m’ayant poussé au vice. J’ai aussi commencé à aller au Rock En Stock pour trouver des bootlegs tellement je voulais tout de Metallica. J’en ai d’ailleurs trouvé un de Garage Days, environ 5 ans avant que Garage Inc. ne sorte officiellement, découvrant par le fait même Motörhead et Misfits. Mettons que je compte les dodos d’ici leur passage en août. (Mon groupe préféré, ex aequo avec les Ramones)
DAN VAPID AND THE CHEATS – II
C’est de loin l’album le plus récent de ma liste. Je ne savais même pas que Dan Vapid avait joué dans Screeching Weasel, The Riverdales et The Methadones. Je suis simplement tombé sur l’album dans une liste top 10 de punknews.org ou Dying Scene. Ce n’est probablement pas l’album le plus mémorable de sa discographie, ni un album qui va marquer l’histoire, mais au moment où je l’ai découvert, j’en avais besoin.
En pleine séparation, je ressentais beaucoup d’incompréhension et de frustration, j’avais l’impression de tout perdre, ça allait mal. Un des premiers déclics qui m’a fait prendre conscience que tout allait finir par s’arranger, c’est en entendant les paroles simples, limite quétaines de Cold and Rainy Days. C’était le petit coup de pouce qui me fallait : « Let’s watch the sunrise; Everything’s going to be okay; You’ll discover that you can recover; From the one who slipped away. » La moitié de l’album était bizarrement spécifique pour me remonter le moral, que ce soit par les mélodies pop-punk joyeuses ou par les textes. Cet album s’écoute d’une traite.
Dans la même période, Remember Sports, Success et Deforesters m’ont aussi beaucoup remonté le moral, mais c’est Dan Vapid qui a eu le plus d’effet. L’album II me ramène toujours dans une happy place.
KERMESS – Les douze nocturnes
J’avais probablement 15 ans, en visite chez mes grands-parents à Coaticook, lorsque mon père me pointe un jeune l’autre bord de la rue et me dit : « Il est drummer dans un band.» L’aspirant Lars en moi était très impressionné.
Quelques mois plus tard, mon père me dit que son groupe a gagné cégep Rock. Ça en reste là, car il ne se souvenait toujours pas du nom du band. C’est en voyant le clip « L’Effet-Mère » à Musique Plus qu’on a finalement su qui était Kermess. Le weekend suivant, nous sommes allés au HMV du Carrefour Laval acheter l’album.
J’écoutais Douze Nocturnes non-stop, je trouvais ça cool que ce soit le voisin de mes grands-parents, ça donnait une impression de proximité. C’est aussi le premier band québécois « underground » que j’ai vu en spectacle, avec Les Marmottes Aplaties en première partie (j’ai même enregistré la prestation avec une petite enregistreuse cachée; j’avais tellement peur que la GRC m’arrête). C’était comme des légendes locales à mes yeux, même si je n’habitais pas en Estrie. J’admirais qu’ils jouent au Polliwog, sur les compilations « Noël dans la rue » et que même Claude Rajotte en parle au Cimetière des CD. C’est aussi à cette époque que j’ai eu mon premier drum et mon premier band; Kermess me donnait le goût de faire partie de la scène alternative. Même mon adresse Hotmail est à l’effigie des Coaticookois!
IRON MAIDEN – Best of the Beast
Au secondaire, j’écoutais beaucoup de Metallica avec mon ami Frank. Je me contentais pas mal des 2 cassettes que j’avais, mais mon ami avait décidé d’explorer. Il a commencé à me faire écouter du Sepultura et du Slayer. C’était bon, mais je retournais toujours au Black Album et à Kill Em All.
Je me souviens encore quand Frank a mis Best of the Beast, à la piste 7; les premières notes de Aces High ont joué et j’ai capoté ma vie : c’était du génie! Trop épique pour rester impassible. Chanson après chanson, je n’en revenais pas à quel point c’était de la bombe. Les 2 guitaristes qui s’échangent des solos ou, mieux, qui jouent en harmonie; Steve Harris qui jouait aux doigts, je n’avais jamais vu ça. Que dire du drum avec 1235 toms et 984 cymbales de McBrain et la voix de Dickinson… Tout y était. Frank s’est ensuite parti un groupe-hommage à Maiden dans les locaux weirds en face du Centre Molson.
J’aimais y passer du temps. J’y ai même rencontré mon 2e ou 3e band : Black Oxyde (aka le Megadeth de Pointe-aux-Trembles). De plus, l’une des premières chansons que j’ai jouée avec Stampede était un Hallowed Be Thy Name très approximatif. Élément majeur : c’est le premier concert que j’ai vu de ma vie sans mes parents (Marie-Denise Pelletier à la St-Jean de Ste-Do, ça ne compte pas). C’était au Stade Du Maurier avec Dio, Wasp et Dirty Deeds. Même si c’était Blaze Bayley à la voix, le fait de me retrouver dans un show bondé de monde, d’entendre les whoah-oh de Fear of the Dark et de voir Eddy sur scène pour la première fois, c’était magique.
C’est fou de penser qu’à une époque, j’avais vu Maiden plus souvent que les Planet Smashers. Mon amour pour Maiden a récemment atteint son apogée, quand mes fils ont commencé à écouter mes vieux CD. Du moment où Best of the Beast est entré dans le lecteur du sous-sol, il n’en est jamais ressorti. Mon plus vieux chante déjà par cœur Aces High avec des mimiques Bruciennes. On parle souvent de Maiden ensemble; c’est inestimable l’écouter parler de musique avec passion, surtout quand il dit à son frère : « Écoute, c’est mon bout préféré! ». Il a même commencé à initier des amis à l’école… peut-être son futur premier groupe. Il y a définitivement de quoi dans le son et dans le visuel d’Iron Maiden qui va continue
r à captiver les générations à venir. SING IT HELSINKI!
BYE
Texte: Phil Vai
Revue et corrigé: Julie Fortin