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Le retour de Blink 182

Publié le 18 Oct 2022 par

Quand l’industrie musicale s’entremange elle-même

Blink 182
Crédit photo : Youtube/ Msn

Le web s’est rapidement enflammé suite au retour de la formation originale du groupe commercial punk rock Blink 182. Tom Delonge qui retourne aux sources avec Mark Hoppus et Travis Barker pour une première tournée ensemble depuis près de dix ans, ce n’est pas rien!

Plusieurs nostalgiques ont ressenti une certaine excitation lors de l’annonce d’une série de spectacles ainsi que d’un nouvel album. Il va sans dire que j’ai eu une seconde vague de bonheur lors de l’apparition de la première partie en Amérique du Nord. La formation Turnstile sera de retour à Montréal le 12 mai 2023, en première partie de Blink 182.

Malgré mon engouement, j’appréhendais l’achat de mon billet, ayant vu plusieurs mentions de préventes apparaître sur le site de revente populaire Ticketmaster. L’expérience d’achat s’annonçait déjà compliquée, mais je me suis tout de même prêtée au jeu.

«La guerre, la guerre, c’est pas une raison pour se faire mal»

Je suis donc partie avec mon artillerie électronique. Armée de zénitude, j’ai gentiment pris le chemin du «Web» vers la ligne de front de la billetterie. Je tiens également à préciser que je me suis «log in» avec trente minutes d’avance pour être certaine de ne pas manquer la prévente et ce, avec trois appareils électroniques différents. Mon «partner in crime» était «log in» également de son côté. Il a cependant eu accès à la prévente un peu après moi. Nous étions finalement prêts à affronter l’achalandage web.

J’ai eu la ligne sept minutes après le début de la prévente en étant la 1549e personne en file. Quand ce fût mon tour d’assister à la sélection, il n’y avait plus aucun billet disponible sur le parterre, à ma grande déception. J’ai donc décidé de «repacter» mon artillerie et de quitter les lignes de front en me disant que peut-être il y aurait des places disponibles le lendemain à la seconde prévente.

Mon partenaire, qui était décidément en mode «Viking» pas mal plus que moi, est resté dans la file d’attente. Après quatorze longues minutes d’attente, il a eu accès à une paire de billet à 800$ dans le «Pit». Après plusieurs sueurs froides, contemplation de notre folie ainsi que plusieurs nouveaux cheveux gris pour moi, il décida d’acheter lesdits billets et de me les offrir comme cadeau de Noël. C’est exactement ce qu’on appelle « céder à la pression ».

Je n’ai pas de mots pour vous expliquer l’expression qu’a pris mon visage le lendemain en voyant le prix des billets sur le parterre. Le prix avait grimpé à 750$ le billet.

Le prix du billet sur Ticketmaster vendredi le 14 octobre

La légende urbaine

Au départ, le prix de base d’un billet sur le parterre était de 150$. Je connais une personne qui a réussi à avoir sa paire de billet à ce prix. « Va te chercher un 6/49 Louich! » Le prix du billet a grimpé à 182$ après seulement 4 minutes et a bondi à 400$ après 7 minutes. Comment est-ce possible que les prix tombent dans l’exagération après seulement un quart d’heure? Voici l’explication rapide après quelques recherches.

Ticketmaster a un système de revente à même leur site web, ce qui permet aux revendeurs d’acheter et de revendre directement leurs billets en ligne en quasi temps réel. Il y a également un concept appelé «Platinum ticket» qui fait en sorte que le prix fluctue en fonction de l’offre et la demande.

Il va sans dire que le retour du groupe original a eu son lot de popularité, ce qui a fait grimper les billets à une vitesse faramineuse. Je dois également souligner le «business minding» très inhumain des «scalpers» qui ont pratiquement vidé la section « mobilité réduite » pour la revendre au double, voire même au triple du prix.

Ticketmaster a également un système de protection antirobot servant à cibler l’achat truqué. Cette tactique est tellement inefficace qu’elle bloque des comptes de personnes sans aucune raison valable. J’ai eu l’expérience de me faire bloquer mon compte une fois et ça avait été vraiment compliqué lors de la tentative de récupération de celui-ci. Il est très difficile de parler à quelqu’un. Le service téléphonique est souvent en mode « indisponible pour le moment » . C’est également possible de jouer au jeu « serpent et échelle » pendant des heures pour avoir accès à la moindre information, souvent inutile à la situation. Je crois que leur système devrait être sous réévaluation complète afin de prévenir les abus et de punir la vraie problématique.

La chaîne alimentaire musicale

Selon moi, un tel «pricing system» apporte le même effet négatif qu’une bombe bactériologique. Tranquillement, la bactérie entre en contact avec le peuple. De plus en plus de gens tombent et si aucun correctif n’est apporté, on peut se rendre jusqu’à l’extinction complète de la population. C’est un peu le même principe avec ce genre de système, qui est permis par l’industrie. Peu de gens ont le budget pour se payer un «show» à ce prix. Je ne parle même pas ici des dépenses supplémentaires dans la soirée du spectacle («merch», breuvages, nourriture, stationnement, etc.) Le fait que Ticketmaster alloue ce genre de pratique me laisse un goût particulièrement amer.

Il faut faire attention à notre industrie musicale. C’est bien d’encourager la nostalgie et de vouloir revivre les bons vieux souvenirs, mais il faut également penser au futur. Je crois que si l’on ne dépense pas notre énergie et notre argent à encourager les «bands» émergeants, le futur de notre scène chouchou court à sa perte. Il ne faut pas oublier que les artistes, qui sont maintenant capables de performer au Centre Bell, ont eux aussi commencé à quelque part avant d’avoir autant de notoriété. Si personne ne les avait encouragés à ce moment-là, ils ne seraient pas aussi connus, donc aucune nostalgie possible. Il est important d’encourager la scène adolescente qui englobe les futures étoiles montantes du punk sinon nous mettons en danger la survie de la scène musical.

Je ne cible pas seulement Blink 182 ici. Avoir un groupe de musique, c’est investir beaucoup de temps et d’argent, il est donc très difficile d’en vivre. Bart, le chanteur guitariste pour la formation Straigthline, me confiait, suite à son passage au Québec lors de leur tournée en septembre, qu’il se demandait s’il avait toujours les reins assez solides pour continuer sa carrière musicale. Les musiciens sont essoufflés et frustrés et ce, pas seulement au Québec ou à petite échelle.

Il serait temps d’arrêter de se mettre la tête dans le sable et de regarder la vérité en face. Les bons vieux groupes de «skate punk» nostalgiques seront bientôt tous à la retraite. Sans relève, il ne nous restera plus grand chose à écouter, à l’exception de vieux vinyles poussiéreux remasterisés dix fois. Il est donc de notre responsabilité ainsi que celle des billetteries de prendre action «OPC» avant que l’on se retrouve devant une scène morte et quasi inexistante.

La nostalgie, c’est bien, mais il faut aussi regarder vers l’avant et ne pas permettre à l’industrie de s’auto-digérer elle-même. C’est triste de voir que la gamique qui vend les billets et qui donne accès aux concerts est celle qui la tue également à petit feu. Je lève mon chapeau aux billetteries qui n’utilisent pas cette façon malsaine de faire, car vous êtes un exemple à suivre.

Sur une note finale pas mal moins positive…

En conclusion, je crois que le système de billetterie devrait être mieux encadré. Si le prix de la revente de billets était limitée au prix d’achat initial avec un léger supplément pour permettre à la billetterie de survivre, cela donnerait de l’air aux consommateurs ainsi qu’aux artistes en état de construction qui essaient, tant bien que mal, de « survivre » de leur passion. Autrement dit, ceci apporterait une portion tellement plus équitable et plus juste, tout en gardant la portion «business».

Pour les spectateurs n’ayant pas pu se procurer des billets pour le spectacle de Blink 182, je vous invite à suivre l’évènement spécial créé par la salle de spectacle le Turbo Haüs qui vous donnera accès à une soirée gratuite de reprise des chansons de Blink 182 et qui sera, sans aucun doute, aussi solide que leur prestation «live».

Credit: Turbo Haüs

Blink 182 cover show *free* | Facebook

Je serai également de la partie au Centre Bell. Il me fera très plaisir d’aiguiser mon crayon et de sortir mon esprit très critique pour mon article à venir, conditionnellement au prix dépensé pour assister à ce show…