La Dérape – La tête d’affiche du mois d’octobre
Publié le 01 Oct 2023 par Claudia Bo
Quand la banlieue se déchaîne
Ce mois-ci, notre tête d’affiche est le band La Dérape. Julien (basse + lead vocal), Sven (guitare) et Simon (guitare) ont bien voulu répondre à nos questions. Phil, quant à lui, se prélassait sur le vieux continent. Voici une entrevue avec ce band pas si nouveau mais qui mérite à être connu. Voici la Dérape ! Quand la banlieue se déchaîne…
Vous vous appelez La Dérape, et pourtant, je vous connais tous un peu. Vous n’êtes pas vraiment du genre à « déraper », vous êtes tous assez rangés dans la vie. Alors pourquoi La Dérape?
Julien : Je dois commencer par te dire que j’ai passé beaucoup trop de temps dans ma vie à chercher un nom de band… on dirait que c’est un exercice qui fait sortir la pire partie de la créativité de chacun et, quand on a commencé à monter des tounes pour de vrai, on savait que ça s’en venait.
La vérité, c’est que c’est une anagramme.
Et pour toi Simon, déraper, ça veut dire quoi?
Simon : Déraper peut se faire dans tout, pas juste en party/alcool/drogue, etc. Quand ça dérape, négativement ou positivement, c’est aussi de dire qu’on sort du train-train quotidien. On peut dire que la musique c’est aussi une manière pour nous de déraper mais surtout… Après plusieurs semaines de recherche de nom de band, la conversation s’est mise à déraper et l’idée est venue naturellement!
La banlieue est au cœur du thème de votre projet. Pourquoi la banlieue occupe cette place?
Julien : On est tous des parents vivant la vie de banlieusards, des vieux punks rangés mais avec le cœur toujours prêt à rocker!
Simon : Pour Phil qui est le plus urbain de nous tous, partir en banlieue, ça aura été une petite mort ou au moins un gros deuil. De mon côté, j’habite sur une rue de compétition de gazon et de taille de piscines. L’observation des travers des banlieusards, c’est mon quotidien et c’est aussi moi… ça me sert de carburant cynique et ces exemples pratiques là m’irritent et m’amusent.
Et pourquoi indiquer sur Bandcamp venir de Montréal (hehe)?
Julien : Hahaha, oui c’est de la fausse représentation! On est un peu tout autour de l’Île alors on a opté pour une « moyenne géographique ».
Simon : En plus on pratique à Cité 2000 alors Montréal, c’est notre point de rencontre.
J’ai eu beau fouiller autant que j’ai pu, je n’ai pas été en mesure de retracer votre historiographie musicale. Vous aviez déjà joué dans d’autres bands avant de partir la Dérape (en 2018, je pense)?
Sven : J’ai passé plusieurs bands en tant que bassiste, mais rien de notable. Ensuite, c’est devenu plus stable avec un groupe de celtic punk, mais le chanteur est reparti en France et le guitariste en Colombie-Britannique. J’ai été bass filler 1 mois avec Rock and Roll Television, mais je venais d’avoir ma fille – mauvais timing. J’ai préalablement rencontré Simon dans un autre projet. On est resté en contact et il m’a fait écouter un jam de La Dérape… après quelques années, c’est devenu une famille.
Julien : On est dans un nid ici!
Simon : Dans mon cas, des bands de sous-sol donc rien d’intéressant à dire haha!
Julien : Phil et moi, ça fait un bout qu’on joue ensemble. En fait, Phil et moi étions à l’université en même temps et dans des disciplines connexes. On avait des amis communs, mais on ne s’est pas vraiment connus avant de travailler au même endroit… la magie se passait déjà en banlieue à l’époque d’ailleurs… Bref, on a commencé à jouer ensemble dans le coin de 2005 ou 2006 et à faire des shows dans les années suivantes. On a quelques démos pour témoigner de ces années de Stare Eyes, Four Ton Sinister et Lazy Workforce.
Comment vous vous êtes rencontrés et comment est né votre projet?
Julien : Bien des années après notre dernier band, et quelques enfants, Phil et moi on s’est dit qu’on pourrait retourner jammer tranquilles… Je voulais juste chanter, ça faisait des années que ma bass était rangée dans son étui qui était posé dans un coin, quelque part. Phil voulait jouer du pop punk. On n’avait pas de guitariste. On n’avait pas de bassiste. J’ai ressorti ma bass, en attendant qu’on trouve un bassiste. On a cherché un guitariste. On a auditionné pour un guitariste et un bassiste, la belle affaire! Bon, ça n’a pas marché du tout, mais les gars de l’audition nous ont référé Simon.
Simon : J’ai écrit à quelqu’un (je ne me rappelle pas de son nom) sur une page de musiciens qui recherchent des musiciens (le Tinder des musiciens) en voyant une annonce assez vague. Le personnage en question m’a finalement dit qu’il recherchait UNE claviériste, mais il m’a mis en contact avec Phil et Julien. On s’est fait un jam pour le plaisir à la Boite à Musique et on a composé une toune, depuis devenue Ville fantôme!
Julien : Et de là, grâce aux contacts de Simon, on a découvert Sven. Mais, on n’a pas trouvé de bassiste.
Ville Fantôme a fêté son 1e anniversaire en juillet. À quand du nouveau matériel?
Simon : Nous sommes présentement en préproduction du prochain EP qui devrait voir le jour l’année prochaine, sans réelle date définie.
Julien : Printemps prochain! Voilà, c’est dit, rien d’autre à déclarer pour l’instant.
Vous avez fait plusieurs présences sur scène cette année dont une au Pouzza. À court terme, quel serait votre goal, soit l’événement ou avec quel band aimeriez-vous jouer?
Julien : Je suis déjà super heureux de voir comment on a fait le saut de notre local à partager nos chansons. Jouer au Pouzza, c’était fou comme invitation pour nous et jouer dans un évènement qui compte comme celui-là, c’était un souhait un peu fou quand on a commencé à jouer.
Simon : Pour ma part, j’ai toujours dit que je voulais jouer dans des endroits mythiques, mais pas particulièrement gros… les Foufs et bien sûr l’ancien Metropolis! C’est sûr que faire la première partie d’un « gros band », ce serait un honneur! J’aimerais aussi vraiment beaucoup qu’on joue à Music4Cancer. Puisque je fais partie de l’organisation, c’est un festival important pour moi.
Julien : J’adorerais un show admission générale avec Abdominable pour emmener mes enfants qui connaissent leurs chansons par cœur!
Toutes vos pièces sont en français. Avez-vous envisagé passer du « côté obscur » éventuellement, histoire d’élargir vos horizons? Ou vous allez rester dans la langue de Molière?
Simon : On aime le fait de travailler en français, puisque c’est notre langue, et faire rayonner le punk québécois, c’est ce qui nous inspire et nous entoure. La composition en français est un défi, mais aussi un accomplissement.
Julien : Jamais! On pourrait de manière extraordinaire et ponctuellement jouer une reprise d’un band qui chante en anglais. Très rarement. On l’a fait juste une fois pour l’instant.
Mais une toune de la Dérape en anglais? Non, cela n’arrivera pas. Ce n’est pas un désaveu envers mes compatriotes qui chantent en anglais. Ce n’est pas quelque chose que je veux politiser, mais c’est important pour moi. C’est un choix d’être entier et sans compromis dans ce projet. Pour ma langue maternelle. Pour le fait français. Pour le français de l’hexagone qui m’a vu naître, pour le français d’ici, dans lequel j’ai grandi. Pour des sonorités qui sont les miennes. Pour une richesse, riche en elle-même, sans nécessité d’être comparée.
Comment voyez-vous la scène actuellement?
Sven : C’est une scène vraiment très cool. On revoit les visages familiers. La scène est active, le punk rock vit! En contrepartie, certaines choses ont beaucoup changé depuis : le temps et la vie familiale ont eu raison de beaucoup de mes comparses… et la COVID a précipité beaucoup de « retraites » de la scène.
Quand j’ai refait le tour pour trouver des gens avec qui partager des shows ou interpeller des amis booker, les trois quarts de mes contacts n’étaient même plus dans la musique, pour une raison ou pour une autre. Soit, il y a des nouveaux bands, des bands très sympas. Il y a aussi les irréductibles qui continuent et qu’on apprécie! Ce qui est un peu dommage, c’est qu’on ait perdu beaucoup de salles de spectacle ces dernières années dans l’enceinte montréalaise.
Julien et Simon, quelque chose à ajouter?
Julien : J’adore notre scène locale! Je découvre régulièrement des bands fous et des gens vraiment agréables, que ce soit sur la scène, devant ou derrière. On retrouve des visages amicaux familiers et une communauté super ouverte. J’adore voir les punks inonder la ville pendant le Pouzza! À la scène se greffent des artisans cruciaux, que ce soit vous, au Bad Crew, ou un gars en or comme Dominic Gendron derrière la lentille.
J’ai pas le choix d’évoquer Phil et son travail de qualité dans le Clash Podcast. Quand je pense à la scène, je pense à plus que la musique. Je pense à des collectifs comme les Insoumises. Je vois beaucoup de gens qui tentent de bien faire les choses. J’entends des gens prêts à brasser des idées. J’entends de la musique qui vient vraiment me chercher. J’adore notre scène locale.
Simon : La musique punk rayonne plus que jamais ces temps-ci selon moi. On le voit dans les multiples festivals depuis quelques années, ce qui est une bonne chose. La scène punk restera toujours une scène inclusive ouverte et remplie de nouveautés inspirantes. Pour moi le punk c’est aussi de faire quelque chose selon nos convictions et de le faire à notre manière et de le partager aux autres. Mais aussi d’accueillir les autres dans notre folie propre… dans notre dérape!
Comment trouvez-vous la conciliation travail-famille-rockstar? (haha)
Sven : Avec deux bands, ça occupe pas mal tout le temps libre… oups, lapsus, c’est quoi du temps libre? Mais étrangement, aussi bizarre que ça puisse paraître, si je manque 1 de mes 2 jams par semaine, ça affecte grandement mon moral. J’en ai besoin, sinon je suis de mauvais poil et la vie perd ses couleurs.
Julien : La conciliation est aussi grandement facilitée par le côté modeste de notre succès!
Quels sont vos projets à court et moyen terme?
Julien : À court terme, on enregistre notre répertoire avant de recommencer à composer. À moyen terme, on repart en mode composition… on a plein d’idées à développer et des trucs à essayer. On a ben du fun à jouer et composer ensemble, l’objectif principal, c’est de garder ça.
Un album (un vrai là) en préparation, kekchose?
Julien : Je sais que tu adores les EPs alors c’est ce que va se forcer à faire… on visait 20 tounes et plus, mais on va se limiter à 5 ou 6 (7 max!), au printemps. Promis!
Des dates de shows prochainement?
Julien : Oui! On va jouer, en banlieue!!! On débarque dans le bled de Phil pour une soirée de rock incroyable, mais je ne suis pas certain d’être en position pour en divulguer plus, à part la date elle-même et le lieu… Simon, c’est quoi la date? Et le lieu stp?
Simon : 17 février à Boucherville au Pub le Vieux mais avant, on joue le 27 octobre à St-Jean! Suivez-nous pour plus de détails bientôt!
Rédaction : Claudia Bo + La Dérape
Correction : Céline Montminy
Révision : Marie-Eve Landry