GWAR, théâtre sanglant
Publié le 30 Mar 2024 par Patrice Belley
Il était une fois…
Débutons par le commencement de mon aventure avec GWAR, groupe trash heavy métal, punk, hardcore, crossover, rock satirique, déplacé, controversé, sadique et explicite, combinant avec adresse toutes ces subtilités. Encore une fois, c’est un groupe que j’ai découvert il y a cinq ans, grâce à un autre passionné comme moi des vinyles. Un jour, je vous écrirai un article sur un band que je suis depuis ma jeunesse, mais pas cette fois-ci. C’est ça la beauté de la musique, ça n’a pas de fin; nous n’avons jamais terminé de découvrir de nouvelles formations ou simplement d’apprivoiser de nouveaux genres musicaux.
En partant, j’ai un faible pour ceux se présentant au public avec un concept assumé, idéalement avec costumes à l’appui. GWAR est de cette catégorie, ce calibre. Ils arrivent sur le stage, déguisés en monstres ayant chacun sa personnalité. Je n’ai pas encore eu la chance de les voir en spectacle, mais je possède deux DVD d’eux m’ayant permis de constater leur grandeur théâtrale.
Depuis des lunes, je souhaite voir apparaître un de leurs spectacles soit à Montréal ou encore mieux à Québec. Je n’en crois pas mes yeux quand la date du 10 mars 2024 a été annoncée pour ma ville de prédilection. J’ai me suis rapidement procuré deux billets pour y assister avec mon partenaire de show habituel.
Avant de m’y rendre, je me suis fait conseiller de m’habiller en conséquence le jour J venu. Ce qui signifie de porter des vêtements pas trop chers à mes yeux, car il y a de fortes chances qu’ils soient imbibés de sang ou d’autres matières liquides. Je crois fermement que nous n’en ressortirons certainement pas indemnes, marqués de leur empreinte.
Fuck the police
Le soleil se lève à l’horizon en ce dimanche matin du 10 mars accompagné de neige. La neige continue de tomber sans répit. Nous entendons à la radio que le Parc des Laurentides serait fermé jusqu’à L’Étape. Nous nous aventurons à l’entrée de la route de notre destinée pour finalement se buter à un barrage de police interdisant son accès à tous les véhicules, sans exception. Ce n’est pas une tempête qui va empêcher deux gars du Saguenay de se rendre à Québec pour biffer un autre band sur leur checklist.
Je me tourne vers mon conducteur et je lui lance « On passe par le Parc de la Galette », et lui de répondre « La 381, ouin ». Effectivement, la route 381 passant par Baie-Saint-Paul est quant à elle ouverte. Par contre, la neige abondante est aussi de la partie, pavant les routes sinueuses nous menant toujours plus haut vers les nuages.
Repelledeath
Après avoir évité quelques obstacles, comme un pickup avec un trailer pogné dans côte, on a fini par arriver sains et saufs à Beauport. Nous sommes attendus à une adresse fournie par un ami, chanteur dans un nouveau band, nous permettant d’assister à leur pratique. Nous nous pointons à la maison, mais aucun signe de vie même après avoir cogné à toutes les portes à portée de poing. Finalement, une madame sort sur la galerie pour nous indiquer que nous n’étions pas à la bonne adresse. On a eu l’air de vrais voleurs. Je le rappelle en vitesse et il me donne la bonne adresse, heureusement à seulement cinq maisons plus loin.
Le groupe se nomme Repelledeath et œuvre dans le trash métal à Québec. Ils nous ont joué trois compositions originales apparaissant sur leur premier album. La thématique est le cinéma, et chaque chanson porte sur un film. Ça sonnait vraiment bien, j’ai bien hâte de les voir prochainement en spectacle.
Le Knock-out
Sortie à Québec rime avec faire les boutiques de vinyles, mais ayant été retardés dans notre horaire par les surprises que nous réservaient dame nature, nous avons suffisamment de temps pour visiter notre favorite, Le Knock-Out. J’ai mis la main sur quatre nouveaux albums pour ma collection.
Le ventre commence à gargouiller, direction notre casse-croûte préféré Chez Gaston pour y dévorer une succulente poutine parmi leurs spécialités. 18h étant l’heure annoncée pour l’ouverture des portes, nous ne trainons pas trop. En direction de notre objectif bien précis, j’ai été attaqué par deux fois par une chute de neige en provenance du toit d’un vieil immeuble visiblement dangereux.
L’Impérial Bell
En premier lieu, l’évènement devait être tenu au Capitole de Québec. Par la suite, pour une raison que j’ignore, la salle a été changée pour l’Impérial Bell. Maintenant je connais la réponse à cette question : GWAR ne sont pas les plus propres.
Nous débutons par notre traditionnelle tournée des tables de marchandise. Celle de GWAR, plus grande que nature, offre une multitude d’articles des plus flamboyants ornés de couleurs vives. J’ai opté pour un t-shirt représentant le monstre final de l’épopée que nous allons bientôt vivre, ainsi qu’une bande dessinée, trois macarons et leur tournée Scumdogs of the Universe en format CD/DVD/Bluray. Nous poursuivons notre balade pour admirer la merch à vendre de la part des deux autres groupes présents pour assurer la première partie : X-Cops et Cancer Bats.
Nous croisons la « vedette » du show de Pantera beaucoup trop intense. Il était de retour dans son rôle pour une autre performance semblable à sa première. Ce qui me frappe encore plus aux yeux, c’est une affichée apposée sur le mur sur laquelle on peut y lire ceci…
ATTENTION :
GWAR sprays water mixed with non-toxic, food grade dye into the audience.
I you are within the first several rows of the pit, you may get sprayed with this liquid.
The dye will temporarily discolor hair and clothing but washes out easily.
Contact lenses may be discolored but this will wash out with a simple saline rinse.
Je n’avais jamais vu ça de toute ma vie, splendide texte d’avertissement, on ne peut plus honnête.
X-Cops
19 heures tapantes, X-Cops fait une entrée remarquée, chaque membre arborant un uniforme de policier ou de prisonnier. Une brochette de toutes les versions possibles allant du shérif, en passant par le gardien de prison, tous les clichés réunis. J’avais fait mes devoirs au préalable en me procurant leur album en format vinyle et accroché immédiatement à la dynamique qu’ils génèrent.
Groupe composé de membres de GWAR. Encore une fois, un concept bien appliqué dans mes goûts. Chacun des musiciens demeure dans son rôle tout au long de leur prestation. Un paravent occupait le coin gauche de la scène leur permettant de se changer et d’introduire de nouveaux acteurs avec eux selon le sujet abordé. Ils utilisent de nombreux accessoires pour appuyer leurs actions comme un fusil, une matraque, un taser… Au final, j’ai bien adoré leur rendu sur le stage.
Cancer Bats
Cancer Bats, groupe que je ne connaissais pas. Je les avais écoutés à partir de leur bandcamp. Je dirais qu’il explore plusieurs styles musicaux navigant dans le punk, le stoner, le surf pour revenir au hardcore. Il occupait bien toute la grande scène de l’Impérial Bell. Un chanteur dynamique et énergique, courant sans cesse de droite à gauche, de gauche à droite. La foule était déjà plus nombreuse pour ce second groupe précédant la venue de GWAR.
GWAR
21h10, nous entendons des pas lourds se rapprocher de plus en plus vers nous. Chaque monstre se dévoile, un par un, pour aller occuper sa place respective. Le chanteur incarne un minotaure équipé de deux organes génitaux, si on peut vraiment appeler ça ainsi. Les autres barbares sont tous plus laids les uns que les autres, mais ils ont de la classe et du prestige à revendre. Le banquet est maintenant servi, et nous pouvons nous régaler. Un sourire s’est accroché à mon visage et ne s’est estompé qu’à la toute dernière note.
Place au spectacle
Les chansons s’enchainent à un rythme effréné nous démontrant tous leurs talents de musicien. Tout ce qu’ils racontent est dessiné sur un tableau monstrueux et violent, qui prend progressivement vie devant nous. Combat après combat contre différentes représentations d’ennemis. Ils sont sans pitié et ont d’innombrables vengeances à assouvir. Peut-être même des vices à satisfaire ou des envies de torture inavouables. Je m’attendais à une effusion de sang, de faux-sang dois-je dire, et j’ai eu droit à des litres et des litres. Je me tiens à l’écart, juste à la distance limite exacte pour ne pas recevoir de giclements résultant de leurs arrosages en règle. Les fans finis de GWAR et les courageux peuplant le devant du stage en ont pour leur argent et en redemandent. Ils poussent l’audace jusqu’à s’habiller avec des vêtements de couleur blanche pour ajouter du sensationnalisme.
Tous les effets spéciaux déployés sont spectaculaires et de grande qualité irréprochable. Nous avons eu droit à un homme décapité, un zombie scalpé, une tête de président coupée, une fellation réalisée par un ornithorynque, une éjaculation sanguinaire et j’en passe… Tout ce chef-d’œuvre s’est soldé par une mare de sang sur le plancher de cette pauvre salle transformée en champ de bataille. Les murs n’ont pas été épargnés non plus, une bonne job de nettoyage en vue. J’imagine que la première chose que les membres font en sortant de scène est de prendre une douche au plus sacrant. Ensuite, retour dans leur bus tour avec tout leur attirail à remettre en ordre et à laver encore en peu de temps avant leur prochain spectacle à London.
Domptez la bête
Finalement de retour à la réalité, il fallait planifier notre retour prévu au Saguenay, car nous travaillons le lendemain matin qui est un lundi. Vérification rapide pour s’assurer que le Parc des Laurentides est rouvert et des conditions routières qui nous attendent. Ce fût également une autoroute très enneigée que nous avons parcourue, accompagnée d’un ciel couvert de retombées qui n’ont jamais réellement cessé. À 1 heure du matin, j’étais confortable dans mon lit, prêt à rêver du récit captivant et épatant auquel je venais d’assister. Lorsque je fermerai mes yeux avec leurs vers traversant mes oreilles, je les reverrai encore et encore exécuter leurs plus grands succès devant moi. On a ici un groupe unique en son genre, inimitable, rien à envier aux autres. Gloire à GWAR !
Rédacteur : Patrice Belley
Crédit-photo : Annie Freska Blackburn
Correction et révision : Julie Fortin