Joey Cape, perdu au Québec
Publié le 25 Juin 2024 par Patrice Belley
La majorité des shows auxquels j’assiste sont du style musical punk ou métal ainsi que leur dérivée et prédécesseurs. Ce que je recherche en m’y présentant est un rush d’adrénaline pure, instantanée avec de la musique agressive, qui déménage littéralement. À l’occasion, il est intéressant d’ouvrir ses horizons, descendre d’un tempo ou plus en termes de performance musicale. C’est exactement ce beat qui m’habitait lorsque j’ai aperçu la tournée Joey Cape, perdu au Québec se pointer le bout de la guitare dans la liste d’évènements à venir dans mon patelin, au Saguenay à La Baie.
Une conviction est que je n’allais pas manquer ma chance cette fois-ci comme lors du passage de Joey Cape au Saguenay en duo avec son ami Tony Sly. Un grand punk qui nous a malheureusement quittés trop tôt et laissés en reste avec sa formation No Use. Je regrette encore cette décision donc cessons de tourner le fer dans ma plaie. Ce n’est donc que partie remise pour ma rencontre avec Joey Cape en solo, mode acoustique. L’organisateur de ce cadeau offert aux fanatiques de Lagwagon, Ten Foot Pole et XXsmile est le Red Bridge Fest.
Brasserie Port-Alfred
L’hôte de ce majestueux accueil est la Brasserie Port-Alfred qui a ouvert ses portes le 2 février dernier, sur la 1er rue à La Baie. Elle brassait déjà de la succulente bière dont une en l’honneur d’un groupe punk Oi! du Saguenay : Bauxite.
Désormais, ils sont dotés d’une superbe salle de spectacle, rien à envier. La salle est très grande et peut accueillir des groupes de plus grande envergure que les salles avoisinantes existantes. C’est bien aéré entre le bar et les nombreuses tables faisant face à la scène qui est immense. L’éclairage et la qualité sonore sont irréprochables, car j’ai déjà été voir deux autres artistes œuvrer ici. Un mur vitré présente sans gêne une vue typiquement industrielle exposant nos racines, ce portrait se mariant bien avec le contexte punk. J’ai piqué un brin de jasette avec plusieurs amis dont nos chemins ne s’étaient pas croisés depuis un moment.
Johnny Frank, de Xxsmile
En ce samedi 15 juin, un des deux autres détenteurs du même ticket que moi passe me prendre chez moi avec son véhicule. Nous arrêtons plus loin sur notre route pour faire monter une amie, la troisième pièce du puzzle pour une dérape réussie. Le premier à franchir l’escalier le menant au stage intimidant est JF Trépanier alias Johnny Frank, chanteur du groupe Xxsmile. Un groupe dont je n’ai jamais entendu leur nom être prononcé dans mon entourage ou sur mes autres points de contact. Ils sont quatre à produire un pop punk convaincant et proviennent de la ville de Québec.
JF a gratté sa guitare pour nous faire profiter de ses chansons en version acoustique pour l’occasion. Pour ma part, je réussis à mieux apprécier une sonorité alternative, différente quand je connais l’originale généralement davantage accélérée. Malgré tout, j’ai suivi ses sèches envolées et tapé constamment du pied. La foule augmentait la température ambiante en crescendo, c’est bon signe, l’action y est. Tout ce manège m’a instinctivement mené à sa table de marchandises pour approfondir mon apprentissage à l’aide de son CD.
Dennis Jagard, de Ten Foot Pole
Mon premier but est de contempler le delivery de Joey Cape avec sa guitare sèche, mais je suis tellement enjoué d’avoir Dennis Jagard dans ce line-up digne d’une équipe d’étoiles. J’adore son groupe skate punk Ten Foot Pole depuis ma jeunesse et son rendu vocal me fait triper. Ils roulent leur bosse depuis 1983 ayant auparavant porté le nom de Scared Straight et surfent sur la vague skate punk se déversant depuis la Californie. La dernière fois que je l’ai croisé, ça se produisait dans la même ville, mais à l’Hotel Plaza / Bar Paradox juste deux coins de rue à proximité.
À chacune de ses présences scéniques, c’est un coup de circuit. Pour la nôtre, il réussit habilement à séduire son public, le tenir entre ses mains. Nous ressentons la gamme d’émotions qui le transperce et qu’il nous expose lors de ses emportées musicales. Il établit une connexion hors norme avec nous, du moins avec moi.
Sa guitare se faisait aller dans tous les sens, virevoltant régulièrement sur lui-même dans sa frénésie. Je suis convaincu qu’il finira par venir à bout de l’une de ses cordes maltraitées sans retenue. Le punk coule incessamment dans ses veines survoltées. Addition de marque à ma garde-robe avec une nouvelle casquette noire arborant fièrement l’inscription Ten Foot Pole en bleu flash. Je possédais déjà ses quatre albums disponibles en vinyle que je vous pousse à écouter, malgré le fait que ce n’est pas que du vieux Ten Foot.
Joey Cape, de Lagwagon
Pour l’arrivant tant attendu, c’est une relation d’amour de longue haleine que j’entretiens avec Joey Cape et sa bande de « skateux » punk Lagwagon, datant de la procuration de mon premier album en CD acheté avec mon argent de poche insuffisant. C’était l’enchainement endisqué sans tache de A à Z que tout le monde connait, bien entendu le renommé Duh, demeurant mon favori à ce jour. Ces Californiens, progénitures de l’ancêtre Section VIII à partir de 1992, ont puisé l’idée pour leur appellation officielle en se référant à celle de leur bonne vieille tour van. J’ai vécu une extraordinaire prestation de leur cru dans le cadre de leur tournée de 30e anniversaire freinant sa course à l’Impérial Bell de Québec. Ayant même réussi à obtenir leur autographe avant leur départ dans leur bus tour.
Joey Cape alias « The Caper » joue également dans Me First and the Gimme Gimmes et produit des disques pour son label One Week Records. Il s’enligne pour chevaucher les planches de son terrain de jeu et surprise de taille, le monsieur n’est pas seul. Il est accompagné d’un collaborateur qu’il nous présente sous le nom de Brian Wahlstrom prenant place derrière son piano. La fin de cette charmante démonstration de talents se présente comme étant des plus alléchante.
Mêmes notes, pas le même résultat
Il parcourt son éventail de compositions réalisées principalement pour Lagwagon et celles de sa carrière solo. Son setlist s’est promené dans ses classiques punk qui me font encore vibrer après le poids des années. Personnellement, j’ai plutôt préféré les reprises unplugged de Lagwagon, car ce sont des hits que j’ai tant écoutés en boucle et ces interprétations sont rafraichissantes.
Seul bémol, j’ai senti à certaines occasions, un trémolo dans sa voix trahissant un dur lendemain de veille. La veille, la soirée n’a pas été facile au Café du clocher selon les dires de mes espions déployés sur place. Au final, mission accomplie et une clientèle ravie qui en redemandait même après le rappel. Un être généreux de sa personne et dévoué à son art composé de plusieurs facettes, comme il nous en a fait la preuve. Lagwagon est bien passé proche de disparaitre de nos vies en 2000, une séparation qui n’aura duré que deux ans avant leur réunification. Longue vie à son héritage et vivement un nouvel album dans la lignée du dernier Railer.
Quebec Crew
Six de fait, il en reste un. La fête se clôture à Québec pour le dernier concert de ce tour. Au Québec, ça brasse toujours et c’est achalandé plus qu’ailleurs, c’est la seule manière que je peux justifier la motivation de groupes internationaux de trimbaler toute leur gear aussi loin. En plus, ils reviennent fréquemment nous rendre visite dans notre coin de pays. Nous pouvons affirmer que c’est réciproque. Ça se traduit par un contact euphorique qui opère dans les deux sens. Le discours qu’ils nous servent dans leur micro affirmant que nous sommes la meilleure ville visitée est donc assurément véridique. À chacune de leur venue, les fans sortent de leur grotte afin de voir ou revoir leur idole, leur ami, leur source d’évasion.
Rédacteur : Patrice Belley
Crédit-photo : Hugo Fortin
Correction : Val Girard
Révision : Marie-Eve Landry