La Baie embrasse le Culte !
Publié le 22 Août 2023 par Julie Fortin
Le tant attendu Culte de Port-Alfred a célébré sa première édition sous un ciel ambigu, le 5 août dernier. L’événement 100% régional (artistes visuels, musique, produits, etc.) poursuit, entre autres, des objectifs de mise en valeur du bâtiment patrimonial qu’est l’Église St-Édouard et de revitalisation du quartier. Les fonds amassés serviront notamment à organiser les futures éditions du Culte. La populace de La Baie et des environs a manifesté son enthousiasme par sa présence sur le site même de l’église malgré la météo incertaine de la journée. Tout savoir sur les débuts du festival, ici.
Question-culte et début de l’événement
L’événement bat son plein depuis un bon moment déjà quand j’arrive. Vie professionnelle oblige, j’ai remis mon plaisir à plus tard le temps d’un shift de fin de semaine. Je brillais donc par mon absence lors du baptême des planches de Enemy’s et des prestations de Bob et les Macalousses, de Sandra Contour, de Blanc Dehors et de JIGS. Mes souris devant assurer leur subsistance aussi, je n’ai malheureusement aucune magie à sortir de ma manche pour l’occasion. Je vous invite cependant très fortement à suivre la musique de ces formations.
Le périmètre de l’église St-Édouard se rapproche au rythme de mes pas, et je joindrai bientôt le Culte. Je constate la présence d’une bonne lignée de gens sur le trottoir. Ils sont tous installés pour leur divertissement, collés sur l’extérieur des grilles ou dans leur char, café Tim en main. Ils profitent du Culte sans y contribuer. Ce fait suscite une interrogation : pourquoi une tranche de la population – d’un certain âge disons-le – se gave éhontément du Culte ? Dans la mesure où les retombées de l’événement bénéficient à tout le monde, j’les juge un peu d’agir cheap pour 30 piasses bien investies.
L’album-Culte, Partie 1
As One Man
Après une prise de photo culte à l’entrée, j’arrive à la scène et entends As One Man, qui remercie le public, avant d’entamer Mémoire Vive. Je regarde le site autour de moi. Les participants rentrent de plus en plus, et les p’tites familles ont répondu présente. De plus, Andy et Guillaume (Orloge Simard), ont bien raison : l’ex-bâtiment religieux est majestueux. La scène couverte est une extension du perron lui-même. Le tout domine la foule qui s’entasse sur le parvis et le gazon.
As One Man y va par la suite d’une reprise des Bouncing Souls, True Believers, tout en faisant des liens avec l’aspect « croyance » traditionnellement abordé par l’église. Ce que j’ai vu de la prestation d’As One Man était excellent, comme celle du Festival des bières, à Chicoutimi en juillet.
La pluie qui tombe vers la fin du set donne quelque chose de magique et n’empêche pas les gens de s’éclater. Ça dansait sur l’herbe mouillée devant le stage, drink à la main et poncho facultatif. Le chanteur s’accroupit même dans une finale destinée à la relève haute-comme-3-pommes. C’était beau de le voir faire des fists bumps avec les tout-petits à la fin.
Crocodile Country Rock (Hommage à CCR)
Le temps d’un roteux sous le ciel humide et le show commence. Le groupe, connu initialement pour ses concerts-hommages du très apprécié band Creedence Clearwater Revival, s’est mis à l’écriture de chansons. Crocodile Country propose donc quelques-unes de ses compos au public, entre quelques hits connus de la formation originale comme Born on the Bayou.
Avant leur chanson Hold on, le chanteur partage la petite histoire du tournage du vidéoclip. C’était un jour d’hiver neigeux, qui s’est malheureusement soldé par une engelure aux mains. Outch.
J’assiste encore quelques instants au set – les gars sont super drette niveau musical – avant d’errer parmi les kiosques de marchandise et les tentes où logent les artistes un verre de Sour Dragon de la Brasserie Port-Alfred en main. C’est sans surprise que j’apprends que les vinyles 30e anniversaire de WD-40 se sont envolés en 5 minutes. C’est dire comme c’était attendu ! J’emmerde gentiment les chanceux qui ont mis la main sur une copie.
Vie de Quartier
Un peu avant le set, Fred (voix) et Louis-Philippe (guitare) me sont présentés. J’étais vachement contente de pas avoir manqué Vie de Quartier, que je croyais programmé plus tôt. Le quintette au ukulélé et contrebasse entonne tout-de-go un p’tit hommage à Cayouche avec la chanson Fume Fume.
Une petite interruption et le band nous est présenté officiellement, comme étant « Paul Daraîche, mais su’a poudre ». Ça fait rire le crowd et attise les curiosités de ceux qui ne les connaissent pas encore. Il pleut un peu, mais tout le monde s’en fout. Certains sont même venus préparés et se regroupent sous des parapluies.
« Bonsoir le fjord… La Baie! Comment allez-vous? […] Tous les ingrédients sont là pour l’échapper Mesdames et Messieurs ! » de dire Fred entre 2 chansons aux intros parlées rocambolesques. J’avoue vraiment apprécier leurs balades countryrock aux sujets amusants et aux paroles colorées, telles que Vie de Bum et Gravelle, qui n’est pas encore endisquée.
Vie de Quartier a de l’énergie à revendre et emporte tout le monde dans sa vibe de brosse. Fred présente les membres du band, qui joue quelques tunes dans la même énergie. Il cesse de pleuvoir et pis y’a même des éclaircies. Le public a droit à une reprise de Dead Kennedy’s. « Je l’ai maladroitement traduite pour vous […] Holiday In Cambodia est maintenant Férié à La Baie », d’annoncer le chanteur avant d’entonner les notes, et, éventuellement le refrain « C’est férié à La Baie à soir – Tout l’monde est su’l’party »… La dernière, Call malade, a juste accentué l’électricité qui voyage dans l’air orageux.
Le culte de WD-40
En tout respect pour les bands de la programmation du Culte, je ne peux pas m’en cacher. WD-40 est le groupe que j’attends avec impatience ce soir-là. Alex et les boys allaient se lâcher lousse pour leur trentaine du groupe, au sein même du patelin qui les a vu devenir les vétérans du punk qu’ils sont aujourd’hui.
Il doit bien y avoir le double du monde de tantôt à l’intérieur du site. Je me colle aux autres humains de la foule, et pis c’est comme si je revenais des années en arrière. Y’a plein, ben plein de faces que j’ai connues avant, mais que j’ai pas vues depuis des lunes. On va avoir du fun à soir. WD-40 embarque sur le stage, Alex portant un 26 onces de Grey Goose. Il lance « en forme Port-Alfred ? S’ra pas long la Panthère de Verdun est allée se soulager. » Tout au long de la fête, Alex partagera sa bouteille avec les bouches, les verres et les canettes qui se tendent vers lui.
Un trentième épique
Le band ouvre avec la Mer des tourments. Puis, Jour de paye anime la foule, le pit pis moi avec : on se garoche tous, on chante, on crie, on danse, on rit. Après la tune, Alex dit, le sourire bien accroché : « vous êtes juste des esti de malades pis vous l’savez ». Oh que oui, on le sait, et cette playlist de leurs best of allait rester gravée dans les mémoires longtemps.
Durant ce set magique un peu bouetté et pluvieux, tous leurs succès sont joués, de façon plus ou moins éclatée. « Ça finit quand Alex décide qu’une tune finit » de dire le band en riant après la fin d’une longue version de Tout pour le Rock… à moins que ce fût Caisse de douze ? Le trash est intense, la noirceur enveloppe lentement l’impressionnante église. C’est d’une beauté.
La foule chante en chœur avec WD-40. C’est vraiment sauvage et intime comme ambiance; c’est sûr, on semble se connaître tous depuis si longtemps. Puis, la langueur connue de Y’en aura pas de p’tites culottes, avec – oh surprise! – Freska, photographe du Bad Crew, grimpée sur scène pour faire les back vocals avec la sœur du chanteur, Émilie. À ce moment, le public vit littéralement l’extase, comme un immense orgasme commun.
Le pit donne tout ce qu’il a durant Samedi soir gros lendemain de brosse et Mouche à marde. Bientôt le spectacle s’achève et la magie retombe. Tasse-toi donc dans l’chemin est jouée en rappel, comme le dernier morceau d’un gâteau savoureux de bout en bout. Quand la musique cesse, je sors de mon rêve : c’est peut-être fini, mais Alex et les gars de WD‘ ont certainement donné le meilleur show qu’il m’ait été donné de voir.
Orloge Simard
Après la prestation de WD-40 le feu était pogné raide, pis j’étais à moitié morte d’avoir tout donné pour le rock de WD’. La noirceur est arrivée pour de bon. Je regarde la flèche du bâtiment, faite d’ombres et de lumières. Orloge Simard s’installe sur le stage. C’est sous les acclamations bruyantes que les gars sont introduits, juste avant la musique. Ont-ils encore besoin de présentation, eux qui sont aussi connus dans le coin que Barrabas ? La foule a grossi. Elle est rendue compacte, très compacte, et ça alourdit l’air. Je m’éloigne pour avoir un meilleur point de vue.
La musique d’Orloge résonne dans tout Port-Alfred, portée en écho par La Baie des Ha! Ha! Culture du Culte emplit les oreilles, sur fond des accords funky caractéristiques du band. « Avez-vous déjà reçu la culture du culte en plein visage » de demander Olivier (voix), ce qui donne lieu à une vague de cris de joie.
Écouter Orloge Simard, c’est laisser toute la place à l’impertinence crasse drapée d’une syntaxe poétique et d’expressions exquises. Le groupe a son langage, sa couleur, ses tournures de phrases. Pis c’est là toute la beauté d’Orloge : voir le crowd embarquer dans leur culte et chanter leurs louanges.
Je ne connais pas toutes les chansons jouées devant leur public conquis. J’ai cependant cru reconnaître les paroles licencieuses, enveloppées ou non de métaphores, de Eurk, un condom et de Dans ma cabane à pêche. Tout du long, je reste un peu en retrait, à écouter le show et à regarder l’église, d’une décrépitude presque poétique. Elle est toute belle dans la pénombre éclairée des spots. J’pense même avoir aperçu un dude faire du body surfing sur Trip de mush.
L’album-culte, Partie 2
Une première édition cultissime
La première cuvée du Culte se termine sur la prestation d’Orloge Simard. Pour certains, la soirée est encore jeune. Une bonne partie de la foule se déplace donc vers le Plaz’n’ Dox, pour une après-soirée explosive. Pour ma part, la trail s’arrête au parking, n’en pouvant plus d’avoir autant pogoté.
J’me suis cependant laissée dire que j’avais manqué quelque chose, pis que le toit du Plaza avait quasiment levé tellement y’avait du fun pis de la boisson au pied carré. Il faut dire qu’avec Défaillance, Deadcold, Chadnel et DJ Nitram en listing, ça devait être toute qu’une fin de soirée! Je remercie énormément l’organisation pour cette invitation à la première édition du Culte de Port-Alfred. D’ailleurs, je ne dois certainement pas être la seule à penser bien fort « longue vie au Culte ».
Rédaction : Julie Fortin
Photographie : Blackburn Freska Annie
Révision : Marie-Eve Landry