
Les Névrosés et Chevrotine, psychose assurée
Publié le 08 Oct 2024 par Patrice Belley
Soirée Rock’N’Punk annoncée par Les Névrosés et Chevrotine, un épisode de folie assumée. Je m’en étais fait glisser un mot en coulisses, sur ce party qui se tramait, par le chanteur des Névrosés : Steve. C’est un de mes meilleurs amis depuis que nous sommes kids. J’ai donc réservé le 21 septembre dans mon planning. Ça se passe au Pub Le Laser à St-Honoré, notre village natal, désormais une ville avec un seul feu de circulation ! À mon arrivée, je constate que le bar a encore été rénové depuis ma dernière visite, en optimisant leur offre en mode « spectacle ». Je paie « à porte » en sortant un billet de dix dollars de ma poche comme dans le bon vieux temps… inflation va te faire foutre.

La période de soundcheck a été longue et fastidieuse, menant à un résultat dépassant les attentes des Névrosés grâce à l’homme de la situation : Bruno Tremblay alias Bruno Rodéo. Ça lui arrive de troquer son chapeau de cowboy pour celui de soundman. Deux setups distincts dont celui des Névrosés obligeant l’adoption de leur vibe en appliquant un son lourd qui n’est pas évident à ajuster, surtout pour réussir à bien entendre, saisir le vocal.

Toute la gang de St-Ho occupe le perron du Laser. De vieux punks se sont fait convaincre de sortir momentanément de leur tanière. Des amis proches, des amis plus éloignés, des connaissances, tout du bon monde. Des têtes inaperçues dans les années passées, c’était le temps qu’ils ressurgissent. De la grande visite de la ville de Québec qui s’adonne à être dans le coin. Aucun ingrédient manquant pour se lâcher lousse, tripper ce samedi, pas un autre.
Chevrotine + Les Névrosés = les deux hémisphères de notre cerveau en ébullition entrant en fusion.
Chevrotine
Chevrotine, le groupe saguenéen que nous aimons tant. Le Bad Crew vous les a déjà présentés comme tête d’affiche du mois d’août. Je les ai déjà vus à de nombreuses inoubliables reprises en show. Nous pouvons les qualifier de rockeurs chevronnés.

Quatuor de rockeurs
Au vocal féminin, Stéphanie assure. Elle est aussi membre du groupe Les Râleuses. Jean-Philippe, à la basse pour Chevrotine, ayant comme autres bands : Les Vautours, Les Crapules, Electric Freaks, Les Malavenants, Les Fumants et Control Freak. Jeff, aux tambours, appartenant aux affiliations : Les SS et Joé au max.

Une touche remarquable
Éric, l’as de la guit , apposant au passage sa signature remarquable, immanquable dans ses riffs. Il a aussi du vécu en termes de shows avec : Les Roses, Les Dérailleurs, Les Fumants, Duo Turbo, Les Prostiputes et El Señor. Ce soir, il nous livre ses tripes avec une guitare enivrante, presque en perte du Nord. Le crowd de St-ho est survolté, ça rock !

Tirons à vue
Leur adresse et leur justesse croissent de prestation en prestation. Ils ont encore de nouveaux trucs garrochés à notre attention auditive. Stéphanie est enflammée, s’élançant, pieds nus, pour se sentir si vivante. Son tambourin situé dans le creux de la paume de sa main chevrotante est possédé, dominé par le rythme fulgurant. Leurs munitions musicales abattent notre quotidien pour faire place à la fête propulsée par le rock’n’roll. Chevrotine a plus d’une cartouche à nous faire fumer les oreilles.

La névrose en cours se poursuit de plus belle avec un changement de « timbrés »…
Les Névrosés
Les Névrosés sont un groupe horror punk saguenéen. J’y ressens, entrevois des influences d’écoute intensive des échos émis par Misfits, des confins de New York. Mélangeons ça avec de nombreuses explorations musicales de pratiquement tous les groupes punks transformant ainsi chacun des membres en une encyclopédie sur deux pattes.
Ils existent depuis les années 90 et ne sont donc pas à leur premier sacrifice sur scène. Ce sont des amis d’enfance de St-Honoré. Ils ont donné plusieurs spectacles quand on était ados. Les Névrosés ne sont pas très actifs, il faut sauter sur l’occasion lorsque celle-ci se pointe. Quand tu vas les voir live, tu te sens comme lorsque tu te rends à un party d’Halloween, même type de frisson qui parcours ton corps. La table est mise avec un décor orné de deux pierres tombales.

Déréglage cérébral en règle
Ils font une entrée sur le stage qui monopolise la pupille de nos yeux. Rendez-vous jamais manqué avec le théâtre faisant partie intégrante de leur style. C’est un jeu de rôle dans lequel tout le monde présent participe. Les quatre amis ont le visage maquillé, badigeonné de blanc cadavérique. Tous costumés, acclamant le début de l’agonie.

Les résidents de l’hôpital psychiatrique
Simon le spectre, condamnant à l’aide de sa guitare infernale, également membre de Grand Chef Bandit. Lee la goule, siégeant derrière ses peaux, caché parfaitement dans l’ombre, mis à part ses globes lumineux scintillants. L’ingénieur, aux multiples cordes à son arc, est aussi membre de d’autres bands : Richard Blast, Polonium 39 et Les Dérailleurs. Charles-Maxime, le colossal zombie sans pitié avec sa basse mortelle. Il performe également dans d’autres troupes : Grand Chef Bandit, St-Paul…
Pour finir, la bête de scène, le sens du spectacle réincarné dans une enveloppe humaine : Steve. Ayant chanté dans les formations : La Mère Vipère, Les Hybrides et des groupes hommage aux Ramones ainsi que The Clash. Il surgit emprisonné dans une camisole de force s’agenouillant à nos pieds comme un martyr attendant sa sentence.



La mort plane au-dessus de nos crânes
Les Névrosés sont le remède de l’âme que nous désirons entendre. Nous vivons une immersion totale dans ce sombre univers. Leur regard ténébreux et leurs yeux vitreux partiellement injectés de sang pénètrent notre être. Énergie attractive impossible à stopper ou même ralentir, pas le choix de suivre la cadence imposée.

Aliénation mentale
Les Névrosés hurlent leurs titres dont on ne se lasse pas de les scander sans discrétion : À l’ombre de la machine, Un monstre au lac Mon Cœur, Le bal des bâtards, Mort-vivant… Nous avons affaire à des détraqués en liberté sous surveillance de la société musicale.

Déséquilibre psychique
Ils nous gâtent avec une nouvelle toune. Ils doivent aiguiser leur concentration davantage pour celle-là, moins commune et jouée peu souvent. Ça rentre bien, la réception des fans est bonne, ils apprécient le new stuff. Cervelle dans le Jell-O, le voyage tire à sa conclusion.


Chant immortel
Je pourrai revivre ce moment intense en écoutant leur seul stock disponible : compilation de quelques-unes de leurs compositions sur un vinyle 10 pouces. Cette merveille, en quantité très limitée, a été fabriquée par Lee, le drummer du band. Les murs de la salle ont soufflé à mes oreilles une possible réunion de Richard Blast…
St-Ho, engrais à la croissance du punk
À la lumière de l’exposition de tous ces talents d’aujourd’hui et d’hier, on peut en tirer un constat frappant. Il y a, au fil des décennies, une convergence vers Saint-Honoré, qui a toujours été un rouage essentiel au moteur de la scène régionale. Sur ce point de la map, on y retrouve une bonne pépinière de groupes punk rock.
Reconnexion avec la réalité
Que demandez mieux qu’un show bien positionné en plein samedi soir où se côtoient deux concepts passionnels : la musique et l’amitié. On en veut plus des retours sur le spotlight de vieux bands déchus. Je suis convaincu que la région est débordante d’artistes grafignant d’envie de refaire le parcours du backstage vers les feux lumineux.
Je salue les deux groupes « crinqués à fond » ici présents pour leur persévérance et dévouement à la noble cause qu’est la musique, rouage primordial à la santé d’un peuple. Ce tour de force accompli de surcroît avec des textes en français. Vous m’impressionnez les boys et ce depuis belle lurette.


Rédacteur : Patrice Belley
Crédit-photo : Patrice Belley
Correction : Val Girard
Révision : Marie-Eve Landry