De l’overtime signé Taverne Fest
Publié le 12 Juin 2023 par Julie Fortin
L’hôtel Plaza à La Baie était bourré de monde en ce dernier week-end de mai. C’est que c’était la première édition du Taverne Fest, festival de musique ouvrière organisé par les Productions Colimason. La fin de semaine s’annonçait de feu malgré le petit vent frais typique de ce quartier proche de la Baie des Ha! Ha!. Lors du lancement de la programmation, j’avais d’ailleurs interrogé Michel Cantin à ce sujet. Vous pouvez également lire l’article en cliquant ici.
Taverne Fest – Vendredi 26 mai
Déjà, un paquet de punks socialisent dans le stationnement derrière le Plaz’n’Dox avant que les spectacles ne commencent. Une odeur de cigarette et d’herbe embaume l’air du parking, alors que les groupes se créent et se mélangent au gré du mouvement des gens. On se salue à la volée et on rit en attendant les premiers riffs des chansons. Pis j’avais besoin de vivre ça, cette atmosphère avec tout ce monde, ainsi que la frénésie effervescente d’un rassemblement musical. Review d’une fin de semaine mouvementée.
Vermine Kaos (Saguenay)
Enfin, coup d’envoi dans le pub compact du Plaza. Pour le troisième show de son existence, le band occupe le p’tit stage en coin et ouvre le festival. « Salut La Baie, on est Vermine Kaos bienvenue au Taverne Fest », lance Rondeau avant la déferlante hardcore des Vermine. Durant le set, le bar se remplit un peu plus à chaque note.
Les rythmes de Vermine Kaos et la voix de TJ attirent la « punkpulace », qui danse en levant du poing. La scène est compacte mais le son est super. Le groupe joue des titres comme Escouade et Vermine Kaos, leur dernière compo en date. Les tunes animent tous ceux qui habitent le plancher. Durant Faussaires de la science, les gens chantent à l’unisson « Libérez les ani- Libérez les animaux » et c’est vraiment beau à voir. Quand Vermine termine, la glace est brisée et la fête est bel et bien commencée.
Saisissez votre chance de les voir, le 26 août prochain au Limoilou Punx Invasion (Punx Invasion Productions), événement en marge du Punx Make Noise (Punx Make Noise Productions).
Asbestos (Montréal)
Après une prise d’air et de vent, tous descendent au Paradox pour écouter Asbestos. C’était ma première écoute de ce groupe oï, aux influences hardcore, au nom on-ne-peut-plus en lien avec le thème du week-end.
Les musiciens de ce groupe sont excellents. La musique est harmonique et très entraînante; l’ampleur du trash en témoigne. La tension se libère en même temps que la température monte; tous sont crinqués et en veulent encore lors de la chanson La Balade des Vauriens.
Asbestos, l’éclectique, s’amuse à changer l’atmosphère de la salle au gré de ses chansons. Durant ses tunes, le band passe aisément d’un style reggae-ska à un gros circle pit déjanté. Le crowd embarque, et peu importe, parce que ce qu’ils font est fou et bon. Des covers entrecoupent parfois les compositions originales, et l’ambiance monte d’un cran encore. Ils quittent le stage sous les acclamations; Asbestos a donné toute qu’un show.
Une histoire ouvrière
Pour la petite histoire, le mot « asbestos » – amiante en anglais – rappelle l’ancien nom de cette ville productrice du minerai, ainsi que la connexion de chacun à ses racines ouvrières. D’ailleurs, la grève de l’amiante qui s’y est produite en 1949, est un conflit de travail marquant pour le Québec contemporain, entre autres pour son recours aux briseurs de grève (scabs) protégés par la police.
Bandcamp : https://asbestosmtl.bandcamp.com/
Chevrotine (Saguenay)
Le son des premières notes m’a fait rentrer à course du dehors. Pas le temps de finir ma top; j’étais déjà contaminée, comme tous les gens rassemblés autour du stage du Plaza. Chevrotine, à la chanteuse féminine armée d’un tambourin, rocke la vie avec du punk assez funky.
Les premières tunes polluées par l’effet d’un mauvais micro, quand « the show must go on ». Alors la crowd s’en mêle pis tout le monde vient en aide. Le trouble est géré en deux temps trois mouvements. C’est ben pour dire, Stéphanie, en pieds de bas sur scène, continue de chanter et de se trémousser sans se laisser déranger. « La prochaine, c’est pour tous ceux-là qui ont pas de couilles » introduit Paire de Couilles sous les rires de tous. Tout du long, le public s’avoue conquis par les titres de Chevrotine tels que Fêlés dans Tête et Mini Miss.
Au final, Chevrotine est certainement mon coup de cœur du vendredi. Le band est dynamique et la musique enivrante. Enfin, disons juste que si on peut mesurer le niveau de plaisir par la chaleur et le mouvement, on a clairement atteint un peak parce que le trash était à la fois amical et violent.
Pour mieux connaître le band…
Prochain show de Chevrotine : 17 juin 2023 @ Bar à Pitons avec Boredom Empire
Bandcamp : https://chevrotine1.bandcamp.com/album/demo
Viva Bertaga – Hommage à Bérurier Noir (Saguenay)
Quelques jours avant le festival, le groupe Union Thugs a malheureusement dû annuler sa prestation au Taverne Fest, pour des raisons hors de son contrôle. Par chance, Viva Bertaga a vite saisi l’occasion de remplacer le band.
En cette soirée, le trio occupe la scène du Paradox et fait vibrer le public de quelques chansons choisies et magnifiquement exécutées. Évidemment, tout le monde chante et le pit est très vivant. Le saxophone est parfait et tombe à point, parce t’sais Il tua son Petit Frère sans sax c’est pas vraiment Béru.
Puis, Petit Agité résonne, et clairement que tous les punks dans place le sont parce que ça bouge en sale. Quand Porcherie joue, on gueule « Nous sommes noirs, nous sommes blancs, nous sommes jaunes, et ensemble nous sommes de la dy-na-mi-te« . À ce moment-là, on est tous d’une même voix, pis c’est féérique. Enfin, Manifeste fait baisser un peu le presto qui brûle comme une casserole remplie de soupe bouillante. Chacun reprend son souffle dans l’atmosphère lourde et humide. Peu après, le set prend fin pour laisser la place à La Gachette.
La Gachette (Montréal)
C’est le dernier show de la soirée, et non des moindres. Les gars de La Gachette garochent « on n’est pas des rock stars, on est un band de oï, fait que fuck that shit » avant de commencer. S’ensuit une super intro musicale, grasse et sale… comme on se sent après une grosse journée d’ouvrage. Puis, tel un avertissement, Érik lance « êtes-vous prêts » au public, avant qu’on se déchaîne à l’unanimité, sur le stage et dans la fosse au son de Je vous hais tous.
Entre deux chansons, La Gachette n’hésite pas à mentionner sa joie de jouer en sol québécois, au Saguenay. En effet, La Baie est la première date du band depuis son retour d’une tournée européenne. Le Taverne Fest étant prétexte pour nous gâter, le groupe joue quelques-unes de ses nouvelles (Machination, Homme politique), avant de nous asséner Coeur de Hooligan et Jeunesse corrompue.
La baraque est littéralement sur le point d’exploser tellement que ça trashe sur Enfile tes bottes. On est comme une grosse famille, pis on apprécie vachement les rappels de La Gachette, qui est aussi en feu que le crowd. La soirée finit alors que mes jambes m’abandonnent, mais esto que j’me peux pu : J’ai hâte au samedi.
Bandcamp : https://lagachette.bandcamp.com/album/20-ans-dinsoumission
La petite galerie du vendredi…
Taverne Fest – Samedi 27 mai
Parce qu’on doit bien gagner sa vie à quek’ part, je n’ai malheureusement pas pu assister au spectacle exclusif, présenté par Cidre Joli Rouge à la Taverne Racine. De ce que j’en ai su, c’était vraiment génial. Eh oui, les commentaires étaient unanimes quant à la qualité de la performance acoustique d’Érik Gachette, et à la générosité de ce musicien avec le public. J’ai même mis les yeux sur une petite vidéo de la performance de Pick It Up (Hommage à Operation Ivy), en formule punk-a-billy. Je suis vraiment déçue d’avoir raté cet après-midi relax et grandiose. Merci à Michel Cantin pour cet extrait de bonheur.
Kaustyk (Arvida, Saguenay)
Ce soir-là, je ne tiens debout que grâce au Red Bull que j’ai avalé, mais je me donne toute entière pour le rock. Kaustyk, band arvidien au style fuzzcore, ouvre cette 2e journée du Taverne Fest, au pub du Plaz’. Avec leur rythme et l’énergie de leurs accords, ils mettent la barre très haute dès le début. Ils abreuvent le public venu les écouter de leur son super lourd et en profitent pour se présenter après leur entrée en matière. « On est Kaustyk, on vient d’Arvida. On est peut-être différents du décorum punk-oï, mais on est tous de la classe ouvrière« . Chacun a ressenti ce lien ouvrier, au même moment. Ça nous a électrisé.
Kaustyk, c’est du bon pesant plein de disto qui vient te chercher dans le fond de l’âme, doublé d’une voix puissante en accord avec chaque riff. Entre les tunes, le band tisse des liens étroits avec la foule, à l’image de leur complicité sur scène. Le chanteur raconte des parcelles d’histoire du groupe, pis ça nous fait tous triper.
Pour agiter encore plus le crowd, le lead vocal gueule « Arvida, Arvida! » La marée humaine réagit en déboulant de plus belle vers la scène. Kaustyk habite le stage et le pit à la fois, puisque Pascal se garoche plusieurs fois sur le parterre avec sa guit’ pour danser avec le monde. Honnêtement, c’était une entrée en matière parfaite pour cette deuxième soirée, même que ce groupe est MA découverte du jour 2.
Imprégnez-vous de la force sauvage de Kaustyk dans leur Bandcamp. Allez les voir en première partie de Maggots, à Jonquière en Musique, le 8 juillet prochain.
Force Majeure (Montréal)
Le premier set achevé, le foule descend pour poursuivre le party. Force Majeure, trio montréalais composé de Scott (batterie), Karl (chant, guitare) et Martin (basse) commence par une superbe intro musicale avant de se présenter au public. Karl attire l’attention sur le bassiste, qui ne chômera certainement pas en ce samedi soir. En effet, il se trouve que Martin brûlera les planches au sein de 3 groupes différents : Force Majeure, Ultra Razzia et The Prowlers. La foule salue ce dévouement par des « Oh! » et des « Ah! »… Franchement, qu’on se le dise, c’est impressionnant.
Leurs accords street punk oï donnent des bibittes dans tout le corps et animent les pieds. Cependant, l’énergie de Force Majeure ne contamine pas immédiatement le crowd. C’est sans doute une p’tite baisse d’énergie due à la folie d’hier et de cet après-midi. Au rythme des chansons, nouvelles et anciennes, la foule se met à bouger pour de bon pour former un trash digne de mention.
Triste Sire, titre des plus récents, « c’est une nouvelle-nouvelle« , de dire Karl avant d’ajouter « c’est la première fois qu’on va la jouer, pis on a la joue pour vous gens de La Baie« . Évidemment, la foule est contente d’avoir cette primeur, écoute attentivement et bouge un peu plus en guise de remerciement. Finalement, Force Majeure a pitché d’autres tunes telles Les Vraies Affaires et Noirceur, avant de terminer son excellente prestation.
Bandcamp : https://forcemajeuremtl.bandcamp.com/album/promo-mixtape
Bauxite (La Baie)
Comme tous les entractes, on s’agglutine dehors, le temps de changer la température et de profiter de quelques bouffées d’air. Bauxite était prêt, tellement prêt que la transition d’un étage se fait dans l’temps de l’dire. C’est tellement rapide que j’en manque les premières 2-3 chansons, mais j’me reprends rapidement. Sur scène, Michel (chant) contemple la fosse du Plaza, avant de remercier tous ceux présents, ainsi que les collaborateurs de l’événement : » C’est la première édition du Taverne Fest, pis à date on a des esti de bons shows! Merci à tous » [d’être venus, et aux partenaires de soutenir l’événement].
Bauxite est déchaîné, à l’image du public et du mercure qui monte en même temps que le fun. Y fait chaud dans la place, comme lors d’un été de canicule. Silence Hôpital résonne à fond dans les tympans et le public est comme en transe, hypnotisé devant tant d’énergie.
Par chance, la Micro Port-Alfred a tout prévu : les gens se désaltèrent d’une Bitter Punk Bauxite, bière spécialement brassée pour des rassemblements tels que celui-ci. Puis, l’excellente reprise de 42$ par jour de WD-40 est jouée, avec l’écho des voix du crowd. C’est juste épique.
Le temps de quelques chansons de leur album Momie Fer, comme 22:22 – chanson au sublime beat cassé par endroits – et Voisin Gonflable, et les gars de Bauxite quittent le stage pour laisser la place à Ultra Razzia.
Bandcamp : https://bauxite.bandcamp.com/
Ultra Razzia (Montréal)
La soirée est bien avancée. Le public semble être sorti de sa léthargie pour de bon, après le brasse-camarade des spectacles précédents. La performance d’Ultra Razzia promet : déjà le trash vire en masse, les riffs sont accrocheurs et le public chante les tunes en chœur. Dès le début, Carlos Malenfant descend rejoindre la foule dans le pit pour trasher avec elle, tout en continuant son tour de chant. Inutile de dire que ça met l’ambiance en câlique.
C’est ben pour dire, au fil du show ça barde tellement sur le stage que Mathieu (batterie) doit parfois replacer son instrument. Puis, « ça s’appelle En Perdition parce que nous sommes en perdition » gueulé avant la tune crinque juste ben assez les gens pour que le party se poursuive. Martin, à la basse, tient le rythme pour sa deuxième performance. Ses prestations sont impressionnantes, et son jeu démontre toute son habilité. Dans les Vapes est chantée sous les cris de la foule, et le set enflammé d’Ultra Razzia prend fin peu après. Y fait tellement chaud en-dedans qu’on se rue presque dehors pour être au frais en attendant The Prowlers.
Bandcamp : https://ultrarazzia.bandcamp.com/album/la-demo
The Prowlers (Montréal)
Loin d’être fatigué, le peuple du Taverne Fest se montre présent lorsque The Prowlers entame son set. D’entrée de jeu, le band clame « On est The Prowlers… La Gachette, Ultra Razzia et Force majeure en même temps!« , et ça fait rire la foule du Paradox. L’ambiance est amicale et alcoolisée. Quand la musique commence, on crie et bouge immédiatement sur le plancher. Martin, à la basse, est étonnamment vigoureux pour son 3e set de la soirée…
Tout le monde s’amuse tellement au son de Spread Your Bed et de Drunken Skinheads, le pastiche oï du sea shanty irlandais Drunken Sailor. La déception est presque palpable lorsque Sylvain lance « j’espère que vous êtes sur le party un peu parce qui nous reste juste trois tunes« . Sérieux, personne n’était prêt à ça. Évidemment, les trois chansons ont passé aussi vite qu’une seule, et la bulle de chacun s’est crevée quand les dernières notes se sont tues. Décidément, le temps passe trop vite pour ceux qui trashent en chantant.
La petite galerie du samedi
Rédaction : Julie Fortin
Révision : Marie-Eve Landry